Le
principe même de ce spectacle voudrait que l’on en donnât que
les dates et les lieux.
Les spectateurs arriveraient
alors aussi naïfs que des touristes allemands admiratifs
devant le pittoresque uniforme des sympathiques contrôleurs
RATP. Et nous, les "initiés" de Paris Béguin, poufferions
tellement on saurait et eux nan.
Le décor, un café, un bistrot, un
troquet parisien, mais pas en carton pâte avec une fausse
fenêtre ouverte sur une fausse tour Eiffel, un vrai rade avec
un zinc en zinc et un patron en patron qui met trois heures à
vous apporter un verre d’eau d’1cl. Pas de doute… on est à
Paris.
Le spectacle commence en effet
sans même que les gens s’en aperçoivent. Pourquoi ? Les
comédiens se sont infiltrés dans l’établissement. Ils sont
partout. Qui sont les vrais clients ? Qui sont les vrais
serveurs ? Impossible de le savoir avant la fin des dix
premières minutes. L’ambiance s’installe progressivement sans
que l’on sache trop si les personnages hauts en couleurs qui
évoluent, il faut bien le dire, dans leur milieu, sont des
comédiens doués ou des phénomènes de comptoir. Lorsque la
situation devient plus claire, on se rend compte qu’il y a
déjà plusieurs minutes que l’ambiance n’est plus contemporaine
mais celle d’un Paris qui respire la province fleur bleue, la
ritournelle, la gouaille de Mistinguett ou Maurice
Chevalier.
Les comédiens, jeunes mais fins
et généreux, jouent, chantent, dansent, et évoluent dans une
mise en scène d’autant plus habile qu’elle doit s’adapter à
chaque bistrot, et compter avec les inévitables rajouts de
chaises consécutifs à la venue de curieux. La salle est
toujours pleine. Et la troupe espère que "le chapeau",
unique rémunération, le sera aussi.
Alors faites comme nous… allez
dans les cafés du Paris des années 30, c’est moins fatiguant
que de retourner dans les années 30 et de toute façon c’est
même pas possible d’y aller… dans les années
30.
Edouard
Zazate |